En gravissant le Tekoa Canyon, je suis à nouveau frappé par la beauté des lieux. Des montagnes vallonnées et des falaises abruptes surplombent une vallée étroite qui serpente d’avant en arrière.
La scène ressemblerait à celle d’un conte de fées, sauf que les montagnes sont nues et qu’aucun ruisseau bouillonnant ne coule dans la vallée.
Pourtant, il y a quelque chose de magique dans cet endroit.
Alors que nous marchons le long d’un sentier qui traverse le canyon, j’observe les oiseaux voler en groupes d’un côté à l’autre, se réfugiant dans les nombreuses petites grottes qui parsèment les falaises. Les oiseaux captent la brise qui, inévitablement, dérive dans cet étroit canal. Regarder les étourneaux fondre et les colombes s’envoler me fait battre le cœur ; ils suivent un rythme doux et détendu qui est omniprésent ici.
Je ne suis pas le premier à tomber amoureux de cet endroit. Dans la tradition biblique, Tekoa était le terrain de prédilection d’Amos le prophète, dont le lien étroit avec Dieu n’aurait pu être favorisé que par son environnement inspirant. D’autres personnages bibliques allaient et venaient par Tekoa.
Un monastère à flanc de falaise
Mais c’est peut-être le résident le plus célèbre de ce canyon qui s’est installé ici après les temps bibliques. Le moine chrétien du IIIe siècle, Chariton, construisit un monastère au bord d’une falaise. Les vestiges du monastère, à moitié suspendus dans les airs, sont encore visibles pour ceux qui traversent le canyon.
Chariton faisait partie de ces moines introvertis qui faisaient de leur mieux pour s’éloigner de l’agitation de la société commune. Il quitta son premier monastère à Prat Stream (ou Wadi Kelt, où vivait Jérémie le prophète) dans le but d’échapper à l’agitation provoquée par ses disciples tout aussi silencieux, qui interrompirent d’une manière ou d’une autre sa solitude.
À Tekoa Canyon, la vie monastique de Chariton était ascétique et contemplative. Il se débrouillait sans beaucoup parler et jeûnait jusqu’à la nuit et passait des nuits dans une grotte, alternant sommeil et prière.
Tekoa Canyon était l’endroit idéal pour vivre un moine méditatif, en particulier celui qui aimait la solitude. Le canyon abrite l’une des plus grandes grottes à plusieurs niveaux d’Israël, un point attrayant pour quelqu’un qui apprécie le calme et la privation sensorielle.
Lors d’un voyage dans cette grotte (maintenant surnommée Chariton Cave), on pourrait oublier le bruit et les perturbations visuelles de la vie quotidienne. Outre la grotte de Chariton, il existe de nombreuses grottes plus petites dispersées le long des parois du canyon.
Beaucoup sont équipés de rebords rocheux sculptés, d’arches et de murs, témoignage des moines qui sont venus ici, suivant à nouveau Chariton dans la solitude.
Tekoa Canyon est un lieu d’attrait austère et saisissant. Après avoir quitté les États-Unis pour venir en Israël il y a un peu plus de 20 ans, il m’a fallu du temps pour apprécier ce type de beauté. Ayant grandi dans les marécages verdoyants de la Nouvelle-Orléans, en Louisiane, je n’aurais jamais imaginé que je trouverais un paysage de ce genre attrayant. Mais maintenant, je le fais.
Dans cet environnement désertique, chaque structure rocheuse dure devient une sculpture naturelle à contempler. La beauté du ciel bleu sur fond de roche blanche, le cri d’un oiseau solitaire : ces images et ces sons inondent les sens dans des endroits comme Tekoa Canyon.
La scène ici est bien loin de l’endroit où j’ai grandi ; là, une cacophonie bruyante de chants d’oiseaux remplissait des arbres surdimensionnés sous un ciel rempli de nuages d’orage.
En parcourant ce canyon, je me sens attiré par l’idée de solitude et de méditation, celles que l’on ne peut acquérir que dans un lieu sans interruption ni contrainte de temps. Ici, on peut tomber lentement et doucement dans une transe méditative, en se concentrant d’abord sur la beauté de la création de Dieu, puis en se laissant complètement absorber par le silence saisissant.
Bien que la plupart des formes de judaïsme moderne n’accordent pas un accent particulier à la méditation, j’aime penser aux prophètes bibliques comme Jérémie et Élie, qui ont réalisé leur ruach hakodesh (connexion avec le Divin) dans des lieux d’une beauté austère.
Dans le livre de la Genèse, même notre patriarche, Isaac, est sorti pour lasuach basadeh (pour méditer dans les champs). Beaucoup interprètent ces mots comme signifiant une forme de méditation qui se déroule en plein air, loin des limites de la vie quotidienne.
À travers les âges, le hitbodedout, ou l’auto-isolement, a été présenté dans les écrits des mystiques juifs, présenté comme un outil pour atteindre le dvekut (l’attachement à Dieu). Le Rambam et son fils, Abraham Maimonides, ont discuté de la valeur de cette pratique.
Les exemples les plus courants de sages qui pratiquaient l’isolement étaient les grands maîtres hassidiques, comme le Ba’al Shem Tov et le rabbin Nahman de Breslov.
Ainsi, ici à Tekoa Canyon, je suis en bonne compagnie juive alors que je trouve un perchoir parfait sur un gros rocher blanc. Je prends quelques instants pour absorber la vue incroyable, puis ferme les yeux et me concentre sur l’intérieur.
Ensuite, selon les mots d’Abraham Maïmonide, j’essaie de « vider le cœur et l’esprit de tous en dehors de Dieu et de les remplir et de les occuper de Lui ». Et alors que je m’éloigne de mes pensées et que je me concentre sur le chant d’un oiseau solitaire, je tombe dans le flux méditatif qui remplit le Tekoa Canyon.