Plaidoyer pour la libération du Franco-Algérien Boualem Sansal

Boualem Sansal, éminent écrivain et penseur franco-algérien, a disparu. Au moment de la rédaction de cet article, le public ne sait rien de son sort ni de son état. Selon les journaux Le Monde et Marianneles autorités algériennes ont annoncé son arrestation à son arrivée de France à l’aéroport international d’Alger. Cependant, aucune date ni aucun détail supplémentaire sur son arrestation n’ont été divulgués, soulevant des questions sur son sort et ravivant les tensions entre l’Algérie et la France.

C’est d’autant plus inquiétant qu’un porte-parole de l’Élysée a déclaré : « Le président est profondément préoccupé et suit de près la situation », ajoutant qu’il estime que ce grand écrivain et penseur mérite de jouir de sa liberté.

Comment Sansal a-t-il osé se rendre en Algérie, compte tenu de ses récentes déclarations ? Il avait déclaré au journal français Frontière qu’il y avait des terres prises par la France au Royaume du Maroc pendant la période coloniale et annexées à l’Algérie, faisant référence à ce que l’on appelle le « Sahara oriental ».

L’écrivain français Nicolas Mathieu a parlé d’un « piège » tendu à l’éminent penseur. Les événements récents semblent soutenir cette théorie. Les remarques de Sansal ont été considérées comme le crime ultime du point de vue du régime militaire autoritaire algérien.

Compte tenu des positions antérieures de Sansal contre le régime et les groupes islamistes – que le régime algérien courtise depuis les événements terroristes du 7 octobre 2023 – ainsi que de ses opinions pro-israéliennes et de sa visite en Israël en 2014, la « recette » de sa persécution était complet. Cela correspond au régime qu’il a décrit dans une interview avec Marianne comme un régime où « tout en Algérie est étroitement scellé ».

L’écrivain algérien Sansal Boualem pose le 17 août 2015. (crédit : FAROUK BATICHE/AFP via Getty Images)

Sansal est né à Tissemsilt, dans le nord de l’Algérie. Avant de devenir romancier, il a travaillé comme enseignant, consultant, entrepreneur et haut fonctionnaire au ministère de l’Industrie (dont il a été licencié). Il est diplômé d’ingénieur de l’École nationale polytechnique d’Algérie et de l’École supérieure des télécommunications de Paris et titulaire d’un doctorat en économie.

Il a commencé à écrire en 1997 et a publié plusieurs romans, dont La promesse des barbares, Fou de l’arbre vide, Parle-moi du paradis, Ombres brûlées, Le village allemandet Rue Darwin. Ses travaux abordent des questions sensibles telles que l’extrémisme islamique, la guerre civile algérienne (connue sous le nom de Décennie noire, de 1992 à 2002) et le système politique du pays, des sujets qui franchissent les lignes rouges dans un pays classé parmi les plus bas au monde en matière de liberté d’expression. selon un rapport de 2024 d’Article 19, une organisation dédiée à cette liberté dans le monde entier.

Des voix importantes réclament la libération de Sansal

Des voix éminentes ont réclamé la libération immédiate de Sansal, notamment l’écrivain franco-marocain Tahar Ben Jelloun, qui a appelé à sa « libération », et Yasmina Khadra, qui a déclaré AFP« Son arrestation me trouble. Les intellectuels ont leur place dans les tables rondes où l’on discute d’idées, pas dans les prisons. »

Une étape importante a été la mobilisation de plusieurs lauréats du prix Nobel de littérature pour soutenir Sansal, dont Annie Ernaux, Jean-Marie Gustave Le Clézio, Orhan Pamuk et Wole Soyinka, ainsi que Salman Rushdie et Peter Sloterdijk. Ils ont signé une déclaration rédigée par Kamel Daoud, récemment lauréat du prix Goncourt, appelant à la libération de Sansal.

Une partie du communiqué, intitulée Aux défenseurs de la liberté, dit : « Aujourd’hui, je vous parle avec une profonde inquiétude. Mon ami, l’écrivain algérien Boualem Sansal, a été arrêté samedi 16 novembre. Cette tragique nouvelle reflète une horrible réalité dans L’Algérie, où la liberté d’expression n’est plus qu’un souvenir au milieu de la répression, de l’emprisonnement et de la surveillance de masse.


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« Désormais, tout est possible : la prison à vie pour un SMS ou la prison pour un soupir de malaise », indique le communiqué. «Sansal ressemble à un prophète des écritures anciennes, souriant alors qu’il provoque des émotions, des amitiés et la haine des soumis et des envieux. Il écrit sur les tempêtes et les lumières crues de notre époque, profitant de la vie et de l’animosité des autres.

« Il ne fait de mal à personne, ne tue personne et n’emprisonne personne », peut-on lire. « Son innocence, face à la dictature, l’a amené à ignorer le danger. Il a négligé le troupeau qui l’attendait et est retourné dans son pays natal ce samedi-là, en payant un lourd tribut.

De nombreuses organisations internationales de défense des droits de l’homme, défenseurs de la liberté d’expression et associations d’écrivains et de journalistes se sont joints à la cause, faisant de l’arrestation de Sansal un problème mondial qui accroît la pression sur le régime algérien.

Nous espérons que cette pression parviendra à libérer de l’emprise du geôlier ce courageux et libre penseur, qui est l’un des plus éminents défenseurs de la paix.

L’écrivain est un analyste politique spécialisé dans les affaires du Moyen-Orient et les mouvements islamiques, écrivain d’opinion et membre de l’association suédoise PEN. Il vit à Lund, en Suède.